AVANT-PROPOS
Début 1970, un assyriologue et un architecte se rencontrent dans un hôtel de Bagdad, par une nuit de couvre-feu. L’un recherchait un jeune architecte, l’autre me connaissait. Un nom les rapprochait : le professeur Fernand Mayence, helléniste et premier directeur de la mission archéologique d’Apamée de Syrie, par ailleurs mon grand-père. Six mois plus tard et fraîchement diplômé, je débarquais sur les rives de l’Euphrate comme architecte de la mission archéologique belge de Tell Kannâs en Syrie. Des briques cuites de Louvain, je passais aux briques crues de Mésopotamie. Un autre monde, jusque là méconnu, allait se déployer avec l’architecture en terre crue comme fil conducteur, révélant sites et monuments, pays et paysages, villes et villages. Ce fut l’origine de quatre décennies alliant vies et survies, découvertes et rencontres, surprises et accidents. Un itinéraire hors du commun.
Combien de fois ne me suis-je pas dit — seul à Palmyre, Pétra, Louxor, Persépolis, Mohenjo Daro ou Machu Picchu —, que c’était là et dans l’immédiat que devaient venir les architectes en devenir mais aussi les futurs historiens, archéologues, conservateurs, urbanistes, paysagistes, ingénieurs, poètes et écrivains ? L’ouvrage en mode électronique remédie à cette impression fugitive en offrant au lecteur le même voyage que l’auteur, mais en le condensant en autant d’instantanés vécus in situ. Lui faisant faire l’économie de 600 000 kilomètres parcourus en avion.
C’est chose faite : rendre lisible et visible un patrimoine écrit et photographique, à tout moment et en tous lieux. Ce ne fut pas sans peine : supporter le climat — quelques importuns —, répondre à l’inattendu, prendre patience, tenir bon, se rendre disponible, s’adapter aux conditions de vie, autant de clés pour ouvrir et fermer les portes d’un espace-mission, avant de retrouver le port d’attache, exploiter les données et préparer de nouveaux projets. Explorare toujours.
André Stevens
Août 2015